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histoire du pêcheur avec l’éfrit
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bien agréer mes excuses, car maintenant j’ai oublié les bonnes manières depuis le temps que je suis dans la mer, voici déjà plus de mille huit cents ans, sans voir le monde à la surface de la terre ! Quant à toi, tu viendras tous les jours pêcher ici, mais rien qu’une fois ! Et maintenant, qu’Allah te tienne sous sa protection ! » Sur ce, l’éfrit frappa de ses deux pieds la terre, qui s’entrouvrit et l’engloutit.

Alors le pêcheur s’en retourna à la ville tout émerveillé de ce qui lui était arrivé avec l’éfrit ; puis il prit les poissons et les porta à sa maison ; ensuite, ayant pris un pot de terre cuite, il le remplit d’eau et y plaça les poissons, qui se mirent à frétiller dans l’eau contenue dans le pot. Puis, ayant chargé le pot sur sa tête, il s’achemina vers le palais du roi, comme le lui avait prescrit l’éfrit. Lorsque le pêcheur monta chez le roi et lui offrit les poissons, le roi s’émerveilla au comble de l’émerveillement à la vue de ces poissons que lui offrait le pêcheur, car il n’en avait jamais vu de sa vie de semblables en qualité et espèce, et il dit : « Qu’on remette ces poissons à notre négresse la cuisinière ! » Or, cette esclave lui avait été offerte en cadeau, depuis seulement trois jours, par le roi des Roum, et on n’avait pas encore eu le temps d’expérimenter sa cuisine. Aussi le vizir lui ordonna-t-il de faire frire le poisson, lui disant : « Ô bonne négresse, le roi me charge de te dire ceci : Je ne te garde précisément comme un trésor, ô toi la goutte de mon œil, que simplement pour le jour de l’attaque ![1] — Or, fais-nous voir aujourd’hui la preuve de ton art en la cuisson, et la

  1. C’est-à-dire pour les grands jours.