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les mille nuits et une nuit

s’écriaient : « C’est le prix du sang ! Ô malheur ! ô malheur ! Jamais nous ne toucherons au prix de ton sang ! Et plutôt mourir de faim, avec les enfants ! » Et moi, voyant l’inutilité de mes efforts à les calmer, je les laissai quelque temps épancher leur douleur. Puis je me mis à les raisonner, en leur jurant que le Bédouin était un homme de bien, aux intentions excellentes ; et je finis par faire diminuer un peu leurs lamentations. Et je profitai de cette accalmie pour les embrasser, ainsi que les enfants, et leur faire mes adieux. Et, le cœur meurtri, je les laissai dans les larmes de la désolation. Et je quittai la maison, en compagnie du Bédouin, mon maître.

Et, dès que nous fûmes au souk des bestiaux, j’achetai, sur ses indications, une chamelle renommée pour sa vitesse. Et, sur l’ordre de mon maître, je remplis les sacs des provisions nécessaires pour un long voyage, et, tous nos préparatifs terminés, j’aidai mon maître à monter sur sa chamelle, je montai sur la mienne, et, après avoir invoqué le nom d’Allah, nous nous mîmes en route.

Et nous voyageâmes sans discontinuer, et gagnâmes bientôt le désert, où, pour toute présence, il n’y avait que celle d’Allah, et où aucune trace ne se voyait de voyageurs sur le sable mobile. Et mon maître le Bédouin se guidait, dans ces vastitudes, par des indications connues de lui seul et de sa monture. Et nous marchâmes ainsi, sous un soleil brûlant, pendant dix jours, dont chacun me parut plus long qu’une nuit de cauchemars.

Or, le onzième jour au matin, nous arrivâmes à