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les mille nuits et une nuit

que si nous dérobions une seule des pierres de ce palais et de cette terre, nous serions à l’instant frappés de mort ? » Et il sortit à grands pas du palais, en emportant le coffret. Et moi, bien à regret, je vidai mes poches, ma ceinture et mon turban, et suivis mon maître, non sans tourner bien des fois la tête vers ces richesses incalculables. Et je rejoignis dans le jardin mon maître qui me prit par la main, pour traverser la ville, de peur que je ne me laissasse tenter par tout ce qui s’offrait à ma vue et était à la portée de mes doigts. Et nous sortîmes de la ville par la porte de rubis.

Et quand nous approchâmes de l’horizon de cristal bleu, il s’ouvrit devant nous et nous laissa passer. Et lorsque nous l’eûmes franchi, nous nous retournâmes pour regarder une dernière fois la plaine miraculeuse et la cité d’Aram ; mais plaine et cité avaient disparu. Et nous nous trouvâmes au bord du fleuve de mercure que nous traversâmes, comme la première fois, sur le pont de cristal.

Et nous trouvâmes, sur l’autre bord, nos chamelles qui broutaient l’herbe de compagnie. Et j’allai vers la mienne comme vers un vieil ami. Et, après que j’eus resserré les courroies de nos selles, nous montâmes sur nos bêtes ; et mon maître me dit : « Nous retournons en Égypte ! » Et je levai les bras, en remerciant Allah pour cette bonne nouvelle.

Mais, ô mon seigneur, la clef d’or et la clef d’argent étaient toujours dans ma ceinture, et je ne savais pas qu’elles étaient les clefs des misères et des souffrances…