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les mille nuits et une nuit

soient prolongés des jours qu’ils ont perdus ! Tout le monde est mort dans ta maison ! » Et moi, à cette nouvelle, je tombai sur le sol, inanimé.

Or, quand je revins de mon évanouissement, je vis près de moi mon maître le Bédouin qui me soignait et me jetait de l’eau de rose sur le visage. Et moi, étouffant de mes larmes et de mes sanglots, je ne pus, cette fois, m’empêcher de faire des imprécations contre lui et de l’accuser d’être la cause de tous mes malheurs. Et longtemps je le chargeai de toutes les injures, le rendant responsable des maux qui s’appesantissaient et s’acharnaient contre moi. Mais lui, sans rien perdre de sa sérénité et sans se départir de son calme, me toucha l’épaule et me dit : « Tout nous vient d’Allah et vers Allah tout s’en va ! » Et, me prenant par la main, il m’entraîna hors de ma maison.

Et il me conduisit dans un palais magnifique, sur les bords du Nil, et me força d’y habiter avec lui. Et, comme il voyait que rien ne réussissait à distraire mon âme de ses maux et de ses peines, il voulut, dans l’espoir de me consoler, partager avec moi tout ce qu’il possédait. Et, poussant la générosité jusqu’à ses limites extrêmes, il se mit à m’enseigner les sciences mystérieuses, et m’apprit à lire dans les livres d’alchimie et à déchiffrer les manuscrits cabalistiques. Et souvent il faisait apporter devant moi des quintaux de plomb qu’il mettait en fusion, et, y jetant alors une parcelle du soufre rouge du coffret, il transmuait le vil métal en l’or le plus pur.

Mais moi, au milieu des trésors, et entouré par la