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les mille nuits et une nuit

jourd’hui ce régal auquel je n’ai attaché de prix que dans l’idée de le partager avec mon maître ! » Et le kâdi se loua, en son âme, d’avoir épousé une femme qui avait des parents si précieux.

Or, le lendemain, la baguette en tige de palmier œuvra comme la première fois, et amena du trésor du kâdi quelques pièces d’or avec lesquelles l’épouse du kâdi fit acheter des provisions admirables, dont un agneau farci de pistaches, et invita quelques-unes de ses voisines à partager avec elle l’excellent repas. Et elles passèrent le temps entre elles de la manière la plus agréable, jusqu’à l’heure du retour du kâdi. Et les femmes se séparèrent alors, sur la promesse que cette journée de bénédiction se renouvellerait en toute amabilité. Et le kâdi, dès son entrée, cria à la négresse : « Étends la nappe à franges d’or ! » Et, lorsque le repas fut servi, le ladre — qu’Allah le maudisse ! — fut bien étonné de voir, sur les plateaux, des viandes et des provisions plus délicates et plus recherchées encore que celles de la veille. Et, plein d’inquiétude, il demanda : « Par ma tête ! d’où viennent ces choses si coûteuses ? » Et l’adolescente, qui le servait elle-même, répondit : « Ô maître, tranquillise ton âme et rafraîchis tes yeux, et, sans te tourmenter davantage au sujet des biens qu’Allah nous envoie, ne pense qu’à bien manger et à te réjouir l’intérieur. Car c’est une de mes tantes qui m’a envoyé ces plateaux de mets, et je me tiens heureuse si mon maître est satisfait ! » Et le kâdi, à la limite de la joie d’avoir une épouse si bien apparentée et si aimable et si attentionnée, ne pensa plus qu’à profiter le plus qu’il pouvait de tant de bonheur