Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 12, trad Mardrus, 1903.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
218
les mille nuits et une nuit

fort dur pour son corps affaibli, il arriva à l’entrée de Trablous, sa ville. Et, au moment où il en franchissait la porte, il vit des enfants qui jouaient entre eux, et entendit l’un d’eux qui disait à l’autre ; « Comment veux-tu gagner au jeu, toi qui es né en l’année néfaste du kâdi Père-au-pet ? » Et l’infortuné fut heureux d’entendre cela, en pensant : « Par Allah ! ton aventure est oubliée, puisque c’est un autre kâdi que toi qui sert maintenant de proverbe aux enfants ! » Et il s’approcha de celui qui avait parlé de l’année du kâdi père-aux-pets, et lui demanda : « Quel est ce kâdi dont tu parles, et pourquoi l’appelle-t’on Père-au-pet ? » Et l’enfant raconta toute l’histoire de la malice de l’épouse du kâdi, dans tous ses détails, depuis le commencement jusqu’à la fin. Mais il n’y a point d’utilité à la répéter.

Lorsque le vieux ladre eut entendu le récit de l’enfant, il ne douta plus de son malheur, et comprit qu’il avait été le jouet et la risée de la malice de son épouse. Et, quittant les enfants qui continuaient leur jeu, il se précipita dans la direction de sa maison, voulant, dans sa fureur, châtier l’audacieuse qui s’était moquée de lui si cruellement. Mais, en arrivant à sa maison, il la trouva les portes ouvertes à tous les vents, le plafond effondré, les murs à moitié écroulés, et dévastée de fond en comble ; et il courut au trésor, mais il n’y avait plus ni trésor, ni trace de trésor, ni odeur de trésor, plus rien du tout. Et les voisins, accourus en le voyant arriver, lui apprirent, au milieu de l’hilarité générale, qu’il y avait longtemps que son épouse était partie, le croyant mort, et qu’elle avait emporté avec elle, on ne savait dans