Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 12, trad Mardrus, 1903.djvu/230

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
224
les mille nuits et une nuit

incantations de mes ennemis, et briser la sorcellerie qu’ils m’ont écrite ! Mais de grâce ! ô secourable, je te supplie par ton père, par ta mère et par tous les tiens, de ne point parler à personne de mon état, même pas au fils de ton oncle, mon maître, le collecteur des taxes. Car s’il connaissait mon secret, il serait capable, parce qu’il est un homme d’une foi éclairée et un observateur rigoureux de la religion, de se débarrasser de moi, pour ne plus avoir dans sa maison un être qui est sous la puissance des sorciers ; et il me vendrait à quelque fellah qui me maltraiterait du matin au soir, et me donnerait à manger des fèves pourries, alors qu’ici je suis si bien sous tous les rapports ! » Puis il ajouta : « J’ai encore une chose à te demander, ô ma maîtresse ! ô bonne ! ô secourable ! c’est de prier mon maître le collecteur, le fils de ton oncle, de ne pas m’aiguillonner trop fort le cul, quand il est pressé, car j’ai cette partie de mon individu affligée, pour mon malheur, d’une extrême sensibilité et d’une délicatesse inimaginable ! »

« Et, ayant ainsi parlé, notre baudet, devenu kâdi, me laissa dans une grande perplexité et s’en alla présider le diwân. Et c’est là que tu le trouveras, si tu veux.

« Or moi, ô fils de l’oncle, je ne pouvais garder plus longtemps pour moi seule ce lourd secret, surtout maintenant que je suis en cause, et que je risque d’encourir ta colère et ta disgrâce ! Et je demande pardon à Allah de manquer de la sorte à la promesse que j’ai faite au pauvre kâdi de ne jamais parler à personne de son état de baudet ! Et,