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les mille nuits et une nuit

bilait déjà en lui-même, persuadé qu’il allait pouvoir enfin faire la preuve, devant des témoins, de l’infidélité de son épouse, et la répudier, en la frustrant de ses droits à la dot du mariage. Et l’oncle, les sourcils froncés, allait déjà se lever pour faire qui sait quoi, lorsqu’un cri strident et douloureux se fit entendre, comme d’un enfant qui était pincé ; et Mahmoud, soudain rappelé à la réalité par ce cri, eut la présence d’esprit de changer le fil de l’histoire, en terminant ainsi : « Or, moi, comme je portais l’enfant de la jeune femme sur mes épaules, je voulus, une fois dans la cour, monter dans le harem avec l’enfant. Mais — éloigné soit le Malin ! — j’étais, pour mon malheur, tombé sur une femme honnête qui, comprenant mon audace, m’arracha l’enfant des bras et m’envoya un coup de poing à la figure, dont je porte encore la trace. Et elle me chassa en me menaçant d’appeler les voisins ! Qu’Allah la maudisse ! »

Et l’oncle, père de la jeune femme, en entendant cette fin de l’histoire, se mit à rire aux éclats, ainsi que tous les assistants. Mais seul Ahmad n’avait pas envie de rire, et se demandait, sans pouvoir en comprendre le motif, pourquoi Mahmoud avait ainsi changé la fin de son histoire. Et, le repas terminé, il s’approcha de lui, et lui demanda : « Par Allah sur toi, peux-tu me dire pourquoi tu n’as pas raconté la chose comme elle s’est passée ? » Et Mahmoud répondit : « Écoute ! C’est que je viens de comprendre, par ce cri de l’enfant que tout le monde a entendu, que cet enfant et sa mère se trouvaient dans le harem, et que par conséquent le mari devait