Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 12, trad Mardrus, 1903.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
270
les mille nuits et une nuit

seulement ils en avaient partout sur eux, aussi bien dans les cheveux qu’à la main, mais encore sur les oreilles et dans les narines. Et d’ailleurs toutes les boutiques étaient garnies de vases pleins de ces roses et de ces jasmins ; et le souk en était embaumé, et l’on s’y promenait comme dans un jardin suspendu.

Lorsque le prince Ali se fut ainsi réjoui les yeux de la vue de toutes ces belles choses, il voulut se reposer un peu, et accepta l’invitation d’un marchand qui, assis à la devanture de sa boutique, l’engageait du geste et du sourire à entrer s’asseoir. Et, des qu’il fut entré, le marchand lui donna la place d’honneur, et lui offrit des rafraîchissements, et ne lui posa aucune question oiseuse ou indiscrète, et ne le poussa à aucun achat, tant il était plein de civilité et doué de belles manières. Et le prince Ali apprécia extrêmement tout cela, et se dit : « Quel pays charmant ! Et quels habitants délicieux ! » Et il voulut sur l’heure, tant il était séduit par la politesse et le savoir-vivre du marchand, lui acheter tout ce qu’il avait dans sa boutique. Puis il réfléchit qu’il ne saurait que faire ensuite de toutes ces marchandises, et se contenta pour le moment de lier plus ample connaissance avec le marchand.

Or, pendant qu’il causait avec lui et l’interrogeait sur les coutumes et les mœurs des Indiens, il vit passer devant la boutique un crieur qui tenait sur son bras un petit tapis de six pieds carrés. Et soudain le crieur, s’arrêtant, tourna sa tête à droite et à gauche, et cria : « Ô gens du souk, ô acheteurs ! qui achètera ne perdra pas ! À trente mille dinars