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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/270

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les mille nuits et une nuit

et les reçut avec cordialité. Puis elle prit à part son mari et lui dit : « Nous tuons les deux oies, les deux à la fois, et tu n’amènes qu’un homme avec toi ? Mais quatre invités pourraient encore venir pour faire honneur à ma cuisine. Allons, sors et va vite chercher encore deux de tes amis, ou même trois, pour manger les oies. Et l’homme sortit docilement pour faire ce qu’elle lui ordonnait.

Alors la femme alla trouver l’invité, et l’aborda avec un visage retourné, et lui dit d’une voix tremblante d’émotion : « Ô ! hélas sur toi ! Tu es perdu sans recours ! Par Allah ! tu dois n’avoir pas d’enfants ni de famille pour te jeter ainsi, tête baissée, vers une mort certaine ! » Et l’invité, ayant entendu ces paroles, sentit la terreur l’envahir et s’enfoncer profondément dans son cœur. Et il demanda : « Qu’y a-t-il donc, ô femme de bien ? Et quel est le terrible malheur qui me menace dans ta maison ? » Et elle répondit : « Par Allah ! je ne puis garder le secret ! Sache donc que mon mari a à se plaindre gravement de ta conduite à son égard, et qu’il ne t’a amené ici que dans l’intention de te dépouiller de tes testicules, et de te réduire à la condition d’eunuque châtré. Et, après cela, que tu meures ou que tu vives, hélas et pitié sur toi ! » Et elle ajouta : « Mon mari est allé chercher deux de ses amis, pour l’aider dans ta castration ? »

En entendant cette révélation de l’adolescente, l’invité se leva à l’heure et à l’instant, et sauta dans la rue, et livra ses jambes au vent.

Et, au même moment, entra le mari, accompagné de deux amis, cette fois. Et l’adolescente l’accueillit, en s’écriant : « Ô mon émoi, ô mon émoi ! les oies !