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les mille nuits et une nuit

l’homme le plus savant et le jurisconsulte le plus profond et le plus fin de son temps. Il avait été le disciple et le compagnon le plus aimé de l’imam Abou-Hanifah. Et ce fut lui qui, le premier, doué de l’érudition la plus éclairée, écrivit, rassembla et coordonna en un ensemble méthodique et raisonné l’admirable doctrine instaurée par l’imam, son maître. Et ce fut cette doctrine, ainsi rédigée, qui servit désormais de guide et de base au rite orthodoxe hanéfite.

Et il nous raconte lui-même l’histoire de sa jeunesse et de ses humbles débuts, ainsi que ce qui a trait à une crème aux pistaches et à une grave difficulté juridique résolue. Il dit :

Quand mon père mourut — qu’Allah l’ait en Sa miséricorde et lui réserve une place choisie ! — je n’étais qu’un tout petit enfant dans le giron de ma mère. Et, comme nous étions de pauvres gens et que j’étais le seul soutien de la maison, ma mère, dès que j’eus grandi, se hâta de me placer, comme apprenti, chez un teinturier du quartier. Et je pus ainsi gagner de bonne heure de quoi me nourrir avec ma mère.

Mais Allah Très-Haut n’ayant point écrit dans ma destinée le métier de teinturier, je ne pouvais me résoudre à passer toutes mes journées auprès des cuves de teinture. Et souvent je m’échappais de la boutique pour aller me mêler aux assistants attentifs qui écoutaient l’enseignement religieux de l’imam Abou-Hanifah — qu’Allah le comble de Ses dons les plus choisis ! — Mais ma mère, qui surveillait ma conduite et me suivait fréquemment, réprou-