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la fin de giafar et des barmakides
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Al-Rachid que la lumière de ses yeux. Et il était arrivé à occuper une si large place dans le cœur et la pensée d’Al-Rachid, qu’un jour Al-Rachid en vint jusqu’à ceci, qu’il fit faire un manteau à double encolure et qu’il s’y enveloppa avec son ami Giafar, tout comme s’ils n’étaient tous deux qu’un seul homme. Et il agit ainsi avec Giafar jusqu’à la terrible catastrophe finale.

Or, ô peine de mon âme ! voici comment advint cet événement lugubre qui obscurcit le ciel de l’Islam, et jeta la désolation dans tous les cœurs, éclat de foudre du ciel destructeur.

Un jour — qu’ils soient loin de nous les jours pareils à celui-là ! — Al-Rachid, de retour d’un pèlerinage à la Mecque, se rendait par eau de Hira à la ville d’Anbar. Et il s’arrêta à un couvent nommé Al-Oumr, sur les bords de l’Euphrate. Et la nuit vint pour lui, comme les autres nuits, au milieu des festins et des plaisirs.

Mais, cette fois, son commensal Giafar n’était point en sa compagnie. Car Giafar était à la chasse, depuis quelques jours, dans les plaines voisines du fleuve. Toutefois les dons et les cadeaux d’Al-Rachid le suivaient partout. Et, à chaque heure du jour, il voyait arriver sous sa tente quelque messager du khalifat lui apportant, en marque d’affection, quelque précieux présent plus beau que le précédent.

Or, cette nuit-là — qu’Allah nous fasse ignorer de telles nuits ! — Giafar était assis sous sa tente, en compagnie du médecin Gibraïl Bakhtiassoû, qui était le médecin particulier d’Al-Rachid, et dont Al-