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le parterre fleuri… (le khalifat…)
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griserie bien plus forte. Alors elle me dit : « Et comment as-tu fait, seigneur, pour venir dans notre rue et t’asseoir dans la corbeille ? » Je répondis : « Ô ma maîtresse, c’est l’angoisse de mon urine, seulement qui m’a poussé jusqu’à la rue ; c’est ensuite le vin qui m’a fait m’asseoir dans la corbeille ; et maintenant, c’est ta générosité qui m’introduit dans cette salle où tes charmes ont remplacé dans mon cerveau l’ivresse par la griserie ! »

À ces paroles, l’adolescente fut visiblement satisfaite, et me demanda : « Quel métier exerces-tu ? » Moi je me gardai bien de lui dire que j’étais le chanteur et le musicien du khalifat, et lui répondis : « Je suis tisserand dans le souk des tisserands à Baghdad ! » Elle me dit : « Tes manières sont exquises et font honneur au souk des tisserands. Si à cela tu unis la connaissance de la poésie, nous n’aurons point à regretter de t’avoir reçu au milieu de nous ! Sais-tu des vers ? » Je répondis : « J’en sais un peu ! » Elle dit : « Dis-nous en quelques-uns ! » Je répondis : « Ô ma maîtresse, le visiteur est toujours un peu ému de la réception qu’on lui fait. Encourage-moi donc en commençant, toi la première, à nous réciter quelques-unes des poésies de ton choix ! » Elle me répondit : « Volontiers ! » Et aussitôt elle me récita un choix d’admirables poèmes des poètes les plus anciens, tels qu’Amri’lkaïs, Zohaïr, Antara, Nabigha, Amrou ben-Kalthoum, Tharafa et Chanfara, et des poètes les plus modernes tels qu’Abou-Nowas, El-Rakaschi, Abou-Mossab et les autres ! Et moi j’étais aussi émerveillé de sa diction qu’ébloui de sa beauté. Puis elle me dit : « J’espère maintenant que ton émotion est