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le parterre fleuri… (le nettoyeur…)
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je rencontrai quantité de personnes affolées qui s’enfuyaient de tous côtés ou se cachaient à l’intérieur des portes ; et, un peu plus loin, je vis paraître plusieurs esclaves armés de longs bâtons qui chassaient devant eux tous les passants. Moi je m’informai de ce que pouvait bien être l’affaire, et il me fut répondu que le harem d’un grand personnage allait passer dans la rue, et qu’il fallait que la rue fût déserte de passants. Alors moi, sachant que je m’exposais à un grand danger si je persistais à continuer ma route, j’arrêtai mon âne et m’enfonçai avec lui dans un coin de muraille, en m’effaçant le plus que je pouvais, et en tournant le visage du côté du mur pour ne pas être tenté de regarder les femmes de ce grand personnage. Bientôt j’entendis le passage du harem, que je n’osais regarder, et j’allais songer à me retourner et à continuer mon chemin, quand je me sentis brusquement saisi par deux bras de nègre, et je vis mon âne entre les mains d’un autre nègre qui le prit et s’éloigna. Et moi, terrifié, je tournai la tête, et je vis dans la rue, toutes me regardant, trente adolescentes au milieu desquelles s’en trouvait une semblable, par ses regards languissants, à une gazelle que la soif rend moins farouche et, par sa taille souple et élégante, au rameau flexible de l’arbre de ban. Et moi, les mains liées derrière le dos par le nègre qui me tenait, je fus entraîné de force par les autres eunuques, malgré mes protestations et malgré les cris et les témoignages de tous les passants qui m’avaient vu contre le mur, et qui disaient à mes ravisseurs : « Il n’a rien fait ! C’est un pauvre homme, balayeur d’im-