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les mille nuits et une nuit

mondices et nettoyeur de tripes ! Il est illicite devant Allah d’arrêter et de ligoter un innocent ! » Mais eux, sans rien vouloir entendre, continuèrent à m’entraîner derrière le harem.

« Pendant ce temps, moi je pensais en moi-même : « Quel délit ai-je pu commettre ? Sans doute ce doit être l’odeur assez désagréable des tripes qui a offusqué l’odorat de la dame, laquelle doit être probablement enceinte et, par le fait, a dû ressentir quelque dérangement dans son intérieur. Je crois bien que c’est là le motif, ou peut-être aussi mon aspect assez dégoûtant et ma robe déchirée qui laisse voir les parties malséantes de mon individu. Il n’y a de recours qu’en Allah seul ! »

« Je continuai donc à être ainsi entraîné par les eunuques, au milieu des protestations des passants apitoyés sur moi, jusqu’à ce que nous fussions tous arrivés à la porte d’une grande maison et que l’on me fît entrer dans une avant-cour dont je ne saurais jamais dépeindre la magnificence. Et moi je pensai en mon âme : « Voilà l’endroit réservé à mon supplice. Je vais être mis à mort, et personne de ma famille ne saura la cause de ma disparition ! » Et je pensai aussi, dans ces derniers instants, à mon pauvre âne qui était si serviable et qui ne buttait jamais du pied, jamais, et ne renversait ni les tripes ni les hottes d’immondices. Mais bientôt je fus tiré de mes affligeantes pensées par l’arrivée d’un joli petit esclave qui vint me prier doucement de le suivre, et me conduisit dans un hammam où me reçurent trois belles esclaves qui me dirent : « Hâte-toi de te débarrasser de tes haillons ! » Moi je m’exécutai, et