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les mille nuits et une nuit

de m’habiller et de m’asperger avec de l’eau de roses, elles me prirent par les bras et, comme on conduit un nouveau marié, elles me guidèrent vers une salle meublée avec une élégance que jamais ma langue ne saurait dépeindre, et ornée de peintures en lignes entrelacées et coloriées fort agréablement. Et à peine y étais-je entré que je vis, étendue avec nonchalance sur un lit de bambou et d’ivoire, et vêtue d’une robe légère en étoffe de Mossoul, la dame elle-même entourée de quelques-unes de ses esclaves. En me voyant, elle m’appela en me faisant signe d’approcher. Je m’approchai, et elle me dit de m’asseoir ; je m’assis. Elle ordonna alors aux esclaves de nous servir le repas ; et on nous servit des mets étonnants dont je ne pourrais jamais citer le nom, n’en ayant jamais de ma vie vu de semblables. J’en mangeai quelques porcelaines, de quoi satisfaire ma faim ; puis je me lavai les mains pour manger les fruits. Alors on apporta les coupes des boissons et les cassolettes remplies de parfums ; et, après que l’on nous eût parfumés aux vapeurs d’encens et de benjoin, la dame me versa à boire de ses propres mains, et but avec moi à la même coupe, jusqu’à ce que nous fussions ivres tous les deux. Alors elle fit un signe à ses esclaves qui disparurent toutes et nous laissèrent seuls dans la salle. Aussitôt elle m’attira à elle et me prit dans ses bras. Et moi je lui servis la confiture de façon à la dulcifier, en lui donnant à la fois les tranches du fruit et la gelée. Et chaque fois que je la pressais contre moi, je me sentais grisé par le parfum de musc et d’ambre de son corps et je croyais être en rêve ou tenir dans mes bras quelque houria du paradis.