Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
20
les mille nuits et une nuit

prit place sur son palanquin, et la caravane se mit en marche. Ils franchirent les plaines et les déserts, les terrains unis et les monts accidentés, et arrivèrent de la sorte à la mer d’Al-Konouz, sur le rivage de laquelle ils dressèrent leurs tentes ; et ils construisirent un grand navire où ils firent s’embarquer la jeune fille avec sa suite.

Or, comme le vizir avait donné l’ordre aux conducteurs de la caravane de ne point manquer, une fois la jeune fille confinée dans le palais au sommet de la montagne, de revenir sur le rivage et de détruire le navire, ils se gardèrent bien de désobéir et exécutèrent en tous points la mission dont ils étaient chargés, pour revenir ensuite auprès du vizir en pleurant de tout cela. Et voilà pour eux !

Mais pour ce qui est du Délice-du-Monde, lorsqu’il se fut réveillé le lendemain, il ne manqua pas de faire sa prière du matin et de monter à cheval pour se rendre, suivant sa coutume, au service du sultan. Comme il passait devant la porte du vizir, il remarqua les vers qui y étaient inscrits, et il faillit, à cette vue, perdre tout sentiment ; et le feu s’alluma dans ses entrailles bouleversées. Il revint alors chez lui, où, en proie à l’impatience, à l’inquiétude et à l’agitation, il ne put rester un moment en place. Puis, comme la nuit tombait, et qu’il craignait de révéler son état aux gens de sa maison, il se hâta de sortir pour, perplexe et hagard, errer à l’aventure sur les chemins.

Il marcha de la sorte toute la nuit et une partie de la matinée, jusqu’à ce que la chaleur intense et la soif torturante l’eussent obligé à prendre quelque