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les mille nuits et une nuit

veux-tu me mettre dans une position honteuse en m’obligeant à montrer ma plus intime nudité ! Ô mon enfant, n’est-ce point une chose illicite et un sacrilège ? » Il dit : « Tu dis vrai ! Tu peux en effet garder sur toi le caleçon ! » Mais à peine Jouder eut-il prononcé ces mots, que la vieille s’écria : « Il a consenti ! Frappez-le ! » Et aussitôt de tous les côtés des coups lui tombèrent sur les épaules, drus et nombreux comme les gouttes de pluie, assénés par tous les gardiens invisibles du trésor. Et vraiment ce fut pour Jouder une raclée sans précédents, et telle qu’il ne devait l’oublier de sa vie ! Puis les éfrits invisibles en un clin d’œil le chassèrent, à force de coups, hors des salles du trésor et hors de la dernière porte qu’ils refermèrent comme avant !

Or, le Moghrabin le vit, alors qu’il venait d’être jeté hors de la porte, et se hâta de courir le ramasser, car déjà les eaux, revenues à grand fracas, envahissaient le lit du fleuve et reprenaient leur cours interrompu. Et il le transporta évanoui sur le rivage, et se mit à réciter sur lui des versets du Korân jusqu’à ce qu’il eût repris ses sens. Alors il lui dit : « Qu’as-tu fait, ô pauvre ? Hélas ! » Il répondit : « J’avais déjà surmonté tous les obstacles et rompu tous les charmes ! Et il a fallu justement que ce fût le caleçon de ma mère qui m’occasionnât la perte de tout ce que j’avais gagné, et fût pour moi la cause de cette raclée dont je porte les traces ! » Et il lui raconta tout ce qui lui était arrivé dans le trésor.

Alors le Moghrabin lui dit : « Ne t’avais-je pas recommandé de ne point me désobéir ? Tu vois ! Tu m’as fait du tort à moi et tu t’en es fait à toi-même,