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noncé le nom de fils de David, qui venait tout naturellement sous une plume chrétienne.

Que si cependant on tient à l’authenticité du passage, et si le Messie d’Esdras est bien fils de David, ce sera un rapprochement de plus avec le Messie des rabbins. Entre ce personnage qui monte de la mer et celui qui descend du ciel, il y a une notable diiférence. Un être préexistant pouvait très bien devenir fils de David, d’après l’opinion assez courante parmi les Juifs que les âmes préexistaient auprès de Dieu. Même après sa naissance il pouvait être caché à tous les regards en attendant d’être manifesté au monde. On assignait même la mer comme lieu de sa cachette[1]. Ce qui prouverait que telle est bien la pensée de l’auteur, c’est que le Messie est caché avec d’autres personnes auxquelles on ne peut pas attribuer aussi facilement qu’à lui une origine tout à fait surnaturelle.

Ce n’est plus l’être extraordinaire, l’Élu ou ce Fils de l’homme qui marche avec la Tête des jours, caché auprès de Dieu, tel que le décrivait le livre des Paraboles, c’est un Messie toujours mystérieux, mais qui vient de moins haut. Il monte avec la mer, et aucun texte ne le fait descendre sur les nuées ; il monte avec elles, comme il arrive toujours en Palestine où les nuages viennent du côté de la mer, poussés par le vent d’ouest.

Cependant il fait encore très noble figure, et ses dons surnaturels sont tout à fait extraordinaires. Il n’agit que par sa voix[2] ; ce n’est ni un roi, ni un guerrier. Il ne combat pas, il reproche à ses adversaires leurs impiétés, et cela suffit pour leur faire mordre la poussière. La voix était attribuée aux anges, et ils s’en servent volontiers dans Esdras. Pourtant il serait bien un homme, s’il était avéré qu’il dût mourir. C’est l’affirmation de la majorité des versions, combattue par le silence de certaines autres, et dans le passage le plus troublé du livre[3]. La même incertitude règne, au même endroit, sur la durée

  1. Voir plus loin, p. 222.
  2. xiii, 33 ss.
  3. Les deux versions arabes et la version arménienne n’ont pas cette mort du Christ, variante importante qui n’a été signalée ni par M. Gunkel, ni par M. Vaganay. Certaines versions parlent en plus de la résurrection des morts. Le temps du Messie est de quatre cents ou de trente ans, ou n’est pas indiqué. D’ailleurs voici les textes d’après Hilgenfeld, Messias Judaeorum: latin vii, 28 revelabitur enim filius meus Jesus cum his qui cum eo et iucundabut qui relicti sunt annis quadringentis. 29 et erit post annos hos, et morietur filius meus Christus et omnes qui spiramentum habent homines (ou hominis) ; syriaque vi, 28 revelabitur enim filius meus Messias cum his, qui cum eo sunt, et iucundabit, qui relicti sunt, xxx annis. 29 et erit post annos hos, morietur filius meus Messias et omnes, in quibus est spiramentum hominis; éthiopien (v), 29 revelabitur enim Messias meus cum his qui cum eo et laetificabit eos, qui resuscitabuntur. 30 et post haec ad finem veniet puer meus