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de toutes, est leur assurance délicieuse, leur confiance assurée, au moment où ils se hâtent pour voir la Face de celui qu’ils ont servi et qui va les récompenser dans la gloire.

Cette gradation est successive, le dernier échelon ne sera atteint par les justes qu’au moment du suprême jugement ; cependant le châtiment comme la récompense sont déjà commencés[1].

On a remarqué que les justes devenaient semblables au soleil et aux étoiles ; c’est-à-dire qu’ils auront des corps incorruptibles, comme les corps célestes. C’est une sorte de terme technique pour indiquer la résurrection glorieuse[2]. Il suffirait à lui seul pour prouver que la résurrection n’a pas pour but de rendre les justes à la vie de la terre et de leur permettre de participer au règne messianique. M. Gunkel a exagéré en concluant de cette assimilation des justes aux étoiles que la foi à la résurrection est née chez des peuples qui adoraient les astres et qui prétendaient devenir semblables à leurs dieux[3]. Mais du moins c’est un indice que la résurrection a été conçue comme le passage du monde sublunaire au monde céleste, et cela dans des textes très anciens.

Pendant que les âmes des justes et des pécheurs attendaient dans leurs demeures, les corps restaient ensevelis dans la terre, mais tous devaient ressusciter. C’est après le temps messianique. Au moment de disparaître, le monde ancien entre dans le silence primordial pendant sept jours. Puis tous les morts ressuscitent[4], le jugement est rendu, les uns vont dans la géhenne, les autres dans le paradis. La géhenne est à la fois le « lac du tourment », et le « four » brûlant, le feu. Le monde de la récompense n’a plus rien de contingent et de périssable ; on a déjà dit que le suprême bonheur des justes serait de voir Dieu[5].

J’ai quelque répugnance à argumenter en toute rigueur de ce que la résurrection est placée ici après le temps du Messie, car il n’est pas

  1. Il semble que l’auteur ait voulu marquer cette nuance en mélangeant le futur et le présent : vii, 99 : Hic ordo animarum iustorum ut amodo (syr. ex hoc nunc) adnuntiatur ; praedictae viae cruciatus quas patiuntur amodo qui neglexerint.
  2. Dan. xii, 3 ; Apoc. Bar. li, 3. 10 ; Hén. éth. civ, 2 ; et le commentaire de R. Iehouda le Saint, plus loin, p. 168.
  3. Kautzsch, II, p. 375, note u.
  4. vii, 32 : Et terra reddet qui in ea dormiunt, et pulvis qui in eo silentio habitant, et prumptuaria reddent quae eis commendatae sunt animae. L’auteur n’a pas distingué entre les âmes des justes et celles des pécheurs ; mais ce qu’elles ont vu pendant les sept jours après la mort rend leur situation bien différente ; les prumptuaria ne sont probablement pas les mêmes ; cf. vii, 85 s.
  5. Je ne puis admettre la ponctuation reçue du v. 42, comme si, après altissimi, il n’y avait qu’une virgule. Alors la splendeur de Dieu au lieu de faire à elle seule la balance de tout ce qui passe, ne sert plus qu’à laisser voir ce qui est réservé à chacun !