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idée politique et nationale ; appliquée à Dieu, elle était nécessairement un symbole, mais un symbole très lié aux institutions de la terre. Peut-être est-ce simplement parce que le judaïsme s’en est tenu à la notion du canon hébreu qui ne parlait que du règne de Dieu ici-bas.

Quoi qu’il en soit, le règne de Dieu est une des principales préoccupations du judaïsme, dès le temps des tannaïtes, et sans doute beaucoup auparavant.

On prêtait même à R. Iokhanan, le plus illustre des amoras de Palestine qui avaient été disciples de Iehouda le Saint, cette parole : « toute bénédiction où ne figure pas le règne, n’est pas une bénédiction[1] ». Le sens est que toute bénédiction doit glorifier Dieu comme roi. On en vint à forger un nom barbare, malkiyôth[2], pour designer certains versets de l’Écriture où il était question du règne de Dieu. Ces versets au nombre de dix, quatre de la Torah, trois des Hagiographes et trois des Prophètes, se disaient après la prière du jour de l’an dite ‘Alênou, que nous avons reproduite en entier[3]. D’après Dalman, ces malkiyôth sont même antérieures à la prière, et datent du commencement du second siècle[4]. Elles s’appliquent au règne éternel et permanent de Dieu[5], dont on souhaitait le plein épanouissement sur la terre.

  1. b. Ber. 12a : כל ברכה שאין בה מלכות אינה ברכה.
  2. מלכיות.
  3. Roch-ha Chana, b. 32a ; j. trad. Schwab, t. IV, p. 88 : « Comme le verset Je suis l’Éternel votre Dieu (Nombres, x, 10) est rapproché de celui qui prescrit de célébrer le nouvel an, on y voit une allusion au devoir de réciter les versets qui proclament la royauté divine ».
  4. Z. p, 307, note H.
  5. Ce sont, d’après les livres de prières juifs : Ex. xv, 18 ; Num. xxiii, 21 ; Dt. xxxiii, 5 ; Ps. xxii, 29 ; xciii, 1 ; xxiv, 7. 10 ; Is. xliv, 6 ; Abd. v. 21 ; Zach. xiv, 9 ; cf. Boehmer, Die Studierstube, septembre 1905, p. 536).