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tion et le monde de l’au-delà, qui exigeait pour la résurrection un certain degré spirituel. On en vint donc à distinguer, dans cette école, la condition des ressuscités sous le Messie et dans la vie future. Dans le premier cas, ils mangeaient, buvaient, et usaient du mariage, comme les morts ressuscités par Élie ou Élisée ; dans le second cas, la présence de Dieu leur tenait lieu de nourriture et du reste[1].

Mais d’autres docteurs, et c’était peut-être le grand courant orthodoxe, continuaient de placer la résurrection des morts après les temps messianiques.

D’après les textes examinés, ce devait être l’opinion dominante, et peut-être la seule, au temps de Jésus.

La résurrection, comme le monde à venir, était dominée par la grande idée du jugement et du compte à rendre.

Un tannaïte de la fin du second siècle, Éléazar ben Haqappar, a bien résumé une longue série de spéculations sur ce thème quand il a dit :

Ceux qui naissent vont à la mort, ceux qui meurent vont à la vie et reviennent à la vie pour être jugés ; pour savoir et faire savoir et être connus. Car c’est lui qui nous a moulés, lui le Créateur, l’Omniscient, juge, témoin et plaignant, qui doit juger. Dans son jugement il n’y a ni erreur, ni oubli, ni acception de personne, et il ne reçoit pas de présents, car tout est à lui. Et sache que tout conduit à rendre compte. Et que ton penchant ne te fasse pas accroire qu’il y a au Chéol un lieu de refuge, car tu as été formé malgré toi, tu es né malgré toi, tu as vécu malgré toi, tu mourras malgré toi, et c’est malgré toi que tu rendras un compte en justice devant le roi des rois des rois, le saint béni[2].

  1. Jellinek, Bet ha-Midrasch, VI, p. 148 ss., dix questions sur la résurrection des morts, regardées par l’éditeur comme des traductions de Saadya.
  2. Aboth, iv, 22.