Page:Le messianisme chez les Juifs.pdf/218

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des points les plus avérés. On peut même dire que le soin des talmudistes de conserver intacte toute la tradition rituelle supposait une reconstitution intégrale du culte qui ne pouvait avoir lieu sans le Temple. Or, pouvait-on espérer désormais que le Temple serait rebâti avant l’époque messianique ? Peut-être cependant ne faut-il pas être trop affirmatif sur ce point. Les Juifs attendaient la restauration du culte avec une impatience beaucoup plus grande que les temps messianiques. La venue du Messie était remise à Dieu ; on ne pouvait observer la Loi sans avoir un temple. De là les souhaits passionnés de sa reconstruction prochaine[1]. D’après une baraïtha anonyme, attribuée par quelques-uns à Iokhanan b. Zakkaï, un prosélyte devait avoir toujours un quart de denier prêt pour les sacrifices du Temple, au cas où il serait rebâti de son temps[2].

Une fois rebâti, on espérait bien qu’il ne serait plus détruit ; de toute façon, au temps messianique, il devait être dans toute sa splendeur. C’est ce qu’il faut conclure d’un texte du Sifrê[3] où Raymond Martini a lu précisément la conclusion contraire, parce qu’il interprétait le monde à venir du monde de l’au-delà, du ciel, tandis que c’est un des cas où ce terme signifie simplement l’époque messianique.

Ce réalisme très concret n’excluait pas sans doute des spéculations plus ou moins imaginatives sur le temple construit par Dieu dans le ciel[4]. Mais on se représentait le Temple restauré sur la terre comme une quantité très précise, et il ne semble pas qu’il ait été l’objet, du moins à l’époque des tannas, des embellissements excentriques que nous avons constatés sur d’autres terrains. C’était une amélioration assez modeste que de donner huit cordes aux cithares dans le temple

  1. Quand on cite le Temple on ajoute assez souvent : « puisse-t-il être vite rebâti de notre temps ! » שיבנה במהרה בימינו. Klausner, l. l., p. 116, citant par exemple Michna Ta‘anith, iv, 1 ; Tamid, vii, 3 etc.
  2. KLAUSNER, L l., p. citant b. Jtoch ha-chanah) 3lh.
  3. C’est à propos de DL XXIur, 12 : TEFC □1\’1 5^ ’pSï HÏÏZS ptf’ï babitabit super ipsum : protegens super eum tota die, et inter scapulas eîus habitans * Je cite seulement h Iréduction de Martini : Protegens super eum illud est aedi/lciiun primum : Iota die hoc est aedificium ultimum : et inter scapulas eius habitans aedificatum et confummatam in future saeculo. Il est vrai qu’une autre exégèse s’exprimait ainsi : Protegens super eum in saeeulo I*de ; tota die, « rf dies Messiae ; et inter scapulas eius habitans et perfection ad saeculunt fuluruni, mais dans cette seconde tradi¬ tion les mots aedificuluin et eonsanwiatwn sont superflus, Il ne s’agit plus du Temple, Dana toute la série des textes qui suivent, la comparaison est simplement entre le Temple détruit et le Temple relevé dans le monde à venir.
  4. Telles qu’nn les trouve par exemple pour une époque postérieure dans Bereekilh rabba sur Gex, XXVui, 17* Mais déjà dans les Testaments des douze patriarches, Lévi, V, 1 et dans I’Apucahpse de S. Jean, XI, XVI, 17, en contraste avec XXr, 22.