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penser à Élie. Et c’est bien ainsi que M. Schwab a traduit le Talmud de Jérusalem[1].

Quoi qu’il en soit, Élie était déjà associé par le Siracide à la résurrection des morts. On doit observer que dans ces cas il n’est pas question de messianisme.


II. — LES NOMS DU MESSIE.


Venons à la personne même du Messie.

Et d’abord le nom, ou les noms qui servaient à le désigner.

Au premier rang, il faut naturellement placer le terme même de Messie.

Messie, comme on sait, signifie oint, et par là, lorsqu’il s’agissait d’une personne[2], on entendait certainement une onction religieuse, ou plutôt divine, l’onction répandue au nom de Iahvé, pour marquer et son choix et le pouvoir conféré par lui. Dans l’A, T., que nous rappelons ici brièvement, le prêtre était l’oint[3], mais c’est surtout du roi qu’on disait « l’oint de Iahvé ». Cela s’explique assez par les origines de la royauté en Israël. Elle n’y avait pas de racines, et le roi ne pouvait alléguer ni le sang divin de sa race, ni une tradition monarchique préhistorique. L’élection de Iahvé, et l’onction, furent son titre à l’obéissance. Il était le Sauveur élu et autorisé par Dieu. Cependant le terme d’oint de Iahvé n’était pas absolument restreint à cet emploi. Cyrus, regardé comme l’instrument de Iahvé pour le salut d’Israël, était son oint[4], et les patriarches, organes de la révélation, l’étaient aussi[5], et même, semble-t-il, le peuple entier d’Israël[6]. Le terme d’oint de Iahvé paraissait donc admirablement choisi pour désigner le libérateur futur, celui qui devait, par la vertu de Iahvé, sauver son peuple, et, de fait, il se trouve du moins dans deux passages parfaitement clairs[7].

C’est de là que l’expression a passé aux écrits de l’école pharisaïque, les psaumes de Salomon[8], et l’apocalypse de Baruch[9]. « L’oint de Iahvé » ou « son oint » en parlant de Iahvé, connotait le

  1. T. IV, p. 16 s. dans le traité Sabbath ; passage répété au traité Cheqalim.
  2. Le cas du bouclier de Saül (II Sam. i, 21) est naturellement différent.
  3. Lév. iv, 3. 5 etc.
  4. Is. xlv, 1. Sur l’accentuation anormale de למשיחו לכורש cf. b. Megh. 12a avec la note de Raschi.
  5. Ps. cv, 15 ; I Chr. xvi, 22.
  6. Hab. iii, 13.
  7. Ps. ii, 2 et I Sam. ii, 10 ; cf. Dhorme, Le cantique d’Anne (RB., 1907, p. 386-397).
  8. Ps. Sal. xviii, 6, et certainement aussi xvii, 36 et xviii, 8 ou l’expression Χριστὸς Κύριος équivaut à l’hébreu Messie ou Oint de Iahvé.
  9. Apoc. Bar. xxxix, 7 ; xl, 1 ; lxxii, 2.