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bouche (v. 24 et 35), — dans Isaïe par le souffle de sa bouche ; — il est orné des dons du Saint-Esprit qui sont à peu près les mêmes dans les deux textes (v. 37 et Is. xi, 2). On dirait donc d’un simple développement littéraire d’un ancien oracle.

À y regarder de près, on est surtout saisi par l’application de cet oracle à des circonstances historiques déterminées.

Les Asmonéens sont clairement visés, et rendus responsables du mal. Nous sommes loin du temps du Livre des Jubilés et des plus anciens morceaux des Testaments des XII patriarches, où la tradition du Messie né de Juda s’effaçait presque ou du moins s’associait étroitement aux espérances qu’avaient suscitées les Macchabées, descendants de Lévi. La rupture est complète, et dès lors l’ancien messianisme refleurit et se rattache à la prophétie initiale de Nathan à David, et à la forme que lui avait donnée Isaïe. Il était d’autant plus indiqué d’y revenir que le rejeton de Jessé représentait pour Isaïe la foi de David, interrompue par l’infidélité d’Achaz. Nous sommes donc dans la pure veine traditionnelle. Toutefois les circonstances étaient encore beaucoup plus graves au temps des Psaumes de Salomon. La dynastie qui avait amené l’étranger ou n’avait pas su l’arrêter, autrefois zélée pour la religion d’Israël, était devenue l’ennemi des Pharisiens qui se croyaient seuls véritables représentants de la religion ; elle était soutenue par un parti profane qui s’était fait le persécuteur des saints. Le premier devoir du Messie sera donc de débarrasser le pays de ce parti, de ceux qui sont pour l’auteur « les pécheurs » sans plus. Après quoi il purifiera la terre sainte du contact des étrangers et étendra même sa domination sur le reste du monde.

Ce Messie est un homme descendant de David, choisi par Dieu et manifesté par lui au temps voulu (xviii, 5). L’intervention de Dieu consiste à lui donner le trône, comme dans le Psaume ii dont l’auteur s’est manifestement inspiré (xvii, 23 s.).

La tradition était formelle : le Messie doit hériter du trône de David. Mais on peut dire qu’il sera roi aussi peu que possible. La théocratie juive, dont on a tant parlé, ne trouve vraiment son affirmation qu’ici. Le roi Messie n’aura qu’à prendre pour son compte l’expression qui revient si souvent dans le psaume xvii, que Dieu est le seul véritable roi d’Israël. Autrefois, en demandant un roi, on avait rejeté la royauté de Dieu (I Sam. viii, 7) ; avec le roi Messie, les deux idées seront combinées de manière que Dieu exerce réellement la royauté, car le Messie suit son impulsion comme pourrait le faire un prophète. C’est le rôle de Samuel, tel que le comprenaient les scribes, avec le titre de roi davidique pour la forme. Ou plutôt, comme la grande sève pro-