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phétique était épuisée, on peut se demander si le Messie n’était pas déjà pour eux comme un premier crayon du patriarche Hillel, tel que la tradition l’a imaginé par la suite, descendant de David, et président du sanhédrin. Le Messie est surtout un docteur dans le Ps. xviii (v. 4 ss.).

Le parti pharisien avait horreur du faste royal et des armes ; il ne pouvait se représenter le temps messianique comme un temps de guerres, même heureuses. Par ce point encore il se rattachait à la description isaïenne (xi, 10), où le Messie était vainqueur sans combat.

Le psaume salomonien a plutôt affaibli ce surnaturel très imagé. Il ne revient pas sur la paix qui régnera entre toutes les créatures, même entre les animaux. Le Messie ne tue pas l’impie du souffle de sa bouche (Is. xi, 4) ; il se sert de la parole, et il suffit de ses menaces pour épouvanter les nations (v. 24 s.).

C’est donc en réalité Dieu qui fera tout, et le Messie ne pourra pas même s’attribuer la gloire des armes, comme un David. Il est, beaucoup plus encore que le saint roi, un pur instrument de Dieu, fort par le secours de Dieu, sage par les instructions qu’il reçoit de lui. Son royaume ressemble à celui des anges dans le ciel (v. 43). Et cependant il reconstitue l’ancien royaume d’Israël ; les tribus dispersées seront réunies ; Jérusalem recouvrera sa gloire, tous étant les fils de Dieu. Du Temple et des sacrifices il n’est pas question, non plus que du sacerdoce. Nulle part non plus il n’est dit que ce règne du Messie durera toujours ; il est même indiqué positivement qu’il durera pendant un temps marqué (v. 37). Peu importe, puisque le véritable roi est Dieu, dont le régne est éternel. Une fois les choses mises sur un bon pied, peut-être n’aura-t-on pas même besoin d’un roi-Messie.

L’auteur n’affirme rien ; la tradition étant muette sur les successeurs du Messie, il n’a pas voulu suppléer à son silence. Il est clair que pour lui le Messie est un pur homme, et c’est l’honorer que de comparer sa parole à cette des chefs des anges (v. 43).

Ce qui nous importe le plus ici, c’est de constater que ce messianisme, très spirituel par bien des côtés, est purement terrestre et très national ; on soupire après le règne de la justice et de la sainteté, mais on l’attend sur la terre au sein d’Israël. Et cependant, nous l’avons vu, le même auteur ou du moins, si ces Psaumes ont eu plusieurs auteurs, des esprits imbus des mêmes doctrines avaient déjà une idée très nette de la transcendance des récompenses et des châtiments.