Page:Le messianisme chez les Juifs.pdf/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

définitivement achevée après la répression. C’est peut-être la solution la plus probable, mais il nous demeure quelque doute.

A plus forte raison est-il impossible d’admettre que l’empereur ait acculé à l’apostasie, non seulement les Juifs de Jérusalem, mais ceux de tout l’Empire, en leur interdisant la circoncision. Cette cause de la révolte n’est alléguée que par Spartien dans la Vie d’Hadrien[1]. L’autorité est plus que médiocre.

Ici encore, M. Schürer a su mettre toutes les apparences de son côté. La mesure aurait été générale ; les Juifs n’auraient été atteints que par contre-coup et sans préméditation. Et le savant maître énumère tous les peuples qui pratiquaient la circoncision. L’argument pourrait tourner contre lui. Plus ils étaient nombreux, plus la mesure eût été intolérable. En fait la circoncision avait sans doute disparu chez plus d’un peuple sous l’influence des mœurs grecques. Déjà de son temps Hérodote l’affirme des Phéniciens établis en Grèce[2]. On suppose donc qu’Hadrien espérait porter le dernier coup à cet usage barbare, et on donne comme preuve la pression exercée par les Romains en Arabie. Après la conquête du pays des Nabatéens ils auraient supprimé la circoncision chez les Arabes. Ce fait très intéressant, connu par un texte syriaque du début du iiie siècle[3], prouve trop ou trop peu. S’il s’agit du temps qui suivit immédiatement la conquête, c’était donc vers l’an 106, quelque vingt-cinq ans avant la révolte des Juifs. Si ce fut plus tard, on ne saurait dire si la mesure date d’Hadrien ou d’Antonin.

Et il est bien certain en effet que la circoncision fut interdite du moins à partir d’Antonin, mais avec une exception en faveur des Juifs[4].

Si on lit sans prévention le texte de Modestin dans le Digeste, on en déduit que le même décret qui prohibait la circoncision contenait une exception en faveur des Juifs.

Et cela seul était raisonnable et conforme à la tradition impériale.

De nombreuses décisions, à partir de César, avaient autorisé les Juifs à vivre selon leurs lois et à pratiquer leurs rites. Si la circoncision

  1. C. 14. Moverunt ea tempestate et Iudaei bellum, quod vetabantur mutilare genitalia.
  2. Hér. ii, 104.
  3. Dialogue de Fato, attribué à Bardesanes, résumé dans Eusèbe, Prepar. evang. VI, x, 1-48 ; le passage relatif à la circoncision se trouve dans Cureton, Spicilegium Syriacum, 1855, p. 30 ; cf. Schürer, l. laud., p. 678, note 82.
  4. Modestin, Digeste, xlviii, 8, 11 pr. Circumcidere Iudaeis filios suos tantum rescripto divi Pii permittitur ; in non eiusdem religionis qui hoc fecerit, castrantis poena irrogatur.