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De même[1] :

Jusqu’à ce que le Très-Haut visite la terre, et qu’il vienne, lui-même [comme un homme parmi les hommes, mangeant et buvant] et brise la tête du dragon sur l’eau ; lui-même sauvera Israël [et toutes les nations, Dieu jouant le personnage d’un homme].

Mais voici un passage où la venue de Dieu est franche de tonte interpolation ; c’est Lévi qui parle[2] :

Et il m’a dit : Lévi, je t’ai donné les bénédictions du sacerdoce, jusqu’à ce que je vienne habiter au milieu d’Israël.

Le salut n’est point encore transporté au ciel ; en d’autres termes, l’eschatologie n’est donc point encore transcendante. C’est à peu près celle du début du livre d’Hénoch[3]. On ne saurait la qualifier comme simplement cosmique, puisque nous avons rencontré des traces non équivoques de Messianisme dans la période purement historique où l’on a déjà conscience d’être entré. La résurrection sera placée entre deux, marquée par la transformation des acteurs du drame. Mais nous aurons à revenir plus loin sur ce point spécial.

Après beaucoup d’hésitations, nous rattachons à cette époque, plutôt à cause des allusions au temps que par une analogie totale, l’allégorie des semaines dans Hénoch. Cette vision, comme toute la littérature relative à Hénoch, met fortement en vedette le jugement. Les destinées du monde comprennent dix semaines. Les sept premières vont jusqu’au temps de l’auteur. Les trois dernières sont trois semaines de jugement. Il est donc progressif, et chaque semaine doit avoir une durée notable, d’autant qu’on sait incidemment que la dixième a sept parties. Le premier jugement est exercé par le glaive, mis entre les mains des justes pour châtier les pécheurs[4] :

12 Et ensuite, il y aura une autre semaine, la huitième ; ce sera celle de la justice ; une épée lui sera remise pour qu’il soit fait jugement et justice des oppresseurs, et les pécheurs seront livrés aux mains des justes. 13 Et vers la fin (de la huitième semaine), ils (les justes) acquerront des maisons à cause de leur justice ; et une maison sera élevée pour le grand Roi, dans une splendeur éternelle.

Le second jugement sera le jugement de l’humanité et de la terre ; le troisième, le jugement des anges[5], avec un ciel nouveau.

  1. Aser, vii, 3. Il semble que Siméon, vi, 5, est tout entier chrétien, car il s’agit du salut d’Adam, et non point seulement d’Israël. Et que penser de Nepht., viii, 3 ?
  2. Lév., v, 2.
  3. Voir plus haut, p. 60 ss.
  4. xci, 12 s. (Traduction de M. l’abbé Martin).
  5. xci, 17 (Trad. de M. Martin).