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permission d’en haut ; pour ne pas accuser le Seigneur d’injustice, on rejette la faute sur les esprits célestes dévoyés. Ces soixante-dix pasteurs qui représentent aussi probablement des semaines d’années sont subdivisés en deux périodes de trente-cinq, puis en sous-périodes de douze et de vingt-trois. Le point de départ est le même que dans Daniel, mais le point d’arrivée est plus récent[1].

Quoi qu’il en soit du détail inextricable, à un moment où les brebis étaient devenues aveugles, il leur naît des agneaux.

C’est la formation du parti des Israélites fidèles qui se distingue de la classe dirigeante de la nation, séduite par l’hellénisme. Alors des corbeaux, les Syriens d’Antiochus Épiphane, s’acharnent contre ces agneaux[2] ; mais il leur pousse des cornes, et même une brebis a une très grande corne. Ce n’est pas Judas Macchabée mais plutôt Jean Hyrcan, car on ne pouvait pas dire avec tant de confiance du temps de Judas que les corbeaux n’avaient pas de pouvoir sur lui[3]. Il y a cependant encore beaucoup à craindre de la coalition des ennemis. Enfin Dieu intervient miraculeusement ; la terre s’entrouvre et les ennemis sont précipités. Le glaive aux mains des brebis fait le reste. Le trône de Dieu est placé dans le pays de délices, la Palestine. Les étoiles sont condamnées, puis les pasteurs, puis les brebis aveugles qui sont jetées dans l’abîme du feu, à droite de la maison. Cette maison, Jérusalem et son temple, est reléguée au sud ; une autre prend sa place, apportée toute faite, et le Seigneur des brebis l’habite. Ceux qui avaient été tués ou dispersés reparaissent ; ce serait donc la résurrection si l’on pouvait s’en tenir au texte éthiopien[4], et même les bêtes des champs et les oiseaux du ciel y seraient admis, après avoir imploré les brebis auxquelles ils obéissent. Lorsque tout est terminé, il naît un taureau blanc avec de grandes cornes, le Messie. Tout le monde se transforme en taureau, pendant que le Messie est représenté par un

  1. C’est la domination des Grecs qui est partagée en deux, et il nous semble que l’ordre n’est pas 23 + 12 + 23 + 12, mais 12 + 23 + 23 + 12. Il est impossible de faire coïncider ces chiffres avec l’histoire. De La captivité de Babylone à Cyrus (536) il y a environ 50 ans ; la domination des Perses jusqu’à Alexandre (332) a duré environ 204 ans. La Palestine a été soumise à Alexandre et aux Ptolémées environ 134 ans ; à partir de 198, elle est définitivement aux Séleucides.
  2. Un agneau est saisi par les corbeaux ; probablement Onias III (II Macch. iv, 33 ss.).
  3. L’auteur distingue assez bien les douze derniers pasteurs (xc, 17) des cinquante-huit précédents (xc, 5) (texte éth. à garder contre Beer) qui achèvent cinquante-huit époques. Si nous partons de l’an 110 (La prise de Samarie de 111 à 107 d’après Schürer) comme marquant le dernier assaut infructueux d’Antiochus Cyzicenus, douze semaines d’années nous font remonter à 194, époque où la Palestine est acquise aux Séleucides. Il reste 58 × 7 soit 406 ans qui nous reportent à 590, c’est-à-dire à peu près à la chute de Jérusalem.
  4. xc, 33. Voir plus loin, p. 126.