Mais on lui répondit :
— La même histoire, toujours la même histoire !
Et quelques-uns ajoutèrent :
— Assassin ! assassin !
Tous les animaux sauvages ont le même regard, quand ils se sentent acculés ; M. Bruant eut ce regard qui demande grâce et qui cherche où fuir.
— Quelle histoire ? interrogea-t-il pourtant, essayant de lutter à la fois contre ses terreurs et contre son accès qui revenait.
Ce fut moi qui répondit :
— L’histoire de votre ami, de votre maître que vous aviez promis de sauver ; l’histoire de l’aviron et du couteau qui tous deux frappèrent tour à tour ; l’histoire du sac de cuir où étaient les trente deniers.
Et le cœur des matelots :
— L’aviron et le couteau, assassin Les trente deniers, Judas !
— C’est donc bien lui qui a tué mon frère aîné ! gronda sourdement Vincent de Chédéglise.
— Vincent ! Vincent ! supplia Jeanne, car le misérable faisait grand’pitié.
Le mourant prononça d’une voix assurée :
— Tais-toi, petite-fille, c’est la main de Dieu. Nul ici ne se vengera, sinon Dieu. Cet homme a tué ton père comme il a tué le frère aîné de ton fiancé.
Jeanne joignit les mains et s’affaissa au pied du lit. Bruant s’écria :
— Voyez si elle n’est pas avec moi ?
Le sang remontait à ses joues et ses yeux de chat-tigre luisaient.
— Qu’on la laisse libre ! poursuivit-il ; elle va se jeter dans mes bras. Est-ce qu’il en serait de même si j’avais