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LE VOL SANS BATTEMENT

ment, mollement et sans effort sur une légère brise ; c’est la course en droite ligne ou ces orbes immenses et sans fin dont le résultat est l’ascension si haute qu’on perd l’oiseau de vue ; enfin ce sont tous nos désirs exécutés.

Le vrai vol est là, le seul abordable pour nous par la simplicité de ses grandes lignes, de ses lentes et naïves manœuvres.

C’est la merveille des merveilles du vol !

Je sens que mon style, lorsque je parle du grand vautour, doit sembler exagéré. Il n’en est rien : J’ai beau m’emporter, m’efforcer d’employer des termes excessifs, je n’approche pas du modèle. Je suis terne, incolore, les mots me manquent pour rendre ce que j’ai vu.

C’est donc bien exactement, cette fois, le vol sans battement : sans un seul battement.

Je suis forcé de reconnaître que, pour le penseur qui n’a pas vu, il y a un semblant de raison à n’accepter qu’avec des restrictions ce que j’affirme sur l’économie de ce vol peu connu. Il m’a même été dit que ce que j’énonce de cette absolue absence de battement est l’exposé d’un problème exactement faux, que c’est tout simplement une variante du mouvement perpétuel que je veux faire admettre, etc., etc. ; et à ce propos, toute la kyrielle de raisonnements sur l’équivalence de la dépense et du résultat. On ne va généralement pas au-delà de l’absolue égalité entre l’ascension et la chute.

À cette critique superficielle je réponds d’abord que c’est un fait précis qui ne se discute point puisque c’est un fait. Les yeux ne peuvent tromper surtout quand l’acte est perpétuellement en vue. Puis, que le raisonnement est faux !

Les penseurs de cabinet font comme les intelligences qui s’accomodent facilement de mathématiques légères ; ils oublient une foule de facteurs annexes de ce pro-