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ETUDES D’OISEAUX

où les maisons sont bien alignées, où tout est sec, aride, tiré au cordeau. La huppe ne vient pas là, elle n’y pourrait vivre et, en tous cas, s’y ennuierait ; au lieu de cela, dans ces monuments un peu délabrés de l’ancienne ville, tout est à sa convenance. Les murs immenses lui font l’effet de flancs de montagne, le jardin passablement abandonné a des recoins ombreux et sauvages où elle trouve sa vie ; il y a, en somme, tout ce qu’il faut pour lui plaire, entre autre pas mal d’immondices à retourner ; aussi est-elle là chez elle. Comme jamais on n’en a tué une seule, jamais elle n’a eu peur de l’homme ; et c’est franchement un éloge à faire de la population indigène.

Aux tourterelles maintenant :

La haute ville a des milliers de nids de ces oiseaux. Cette variété qui n’a pas de représentants en Europe est tout à fait gracieuse : sa longue queue, sa petite taille, son air innocent, doux et familier, en font un animal presque domestique : on a ses tourterelles au Caire comme en Europe on a ses canaris, seulement elles sont libres. Comme familiarité, jugez-en par le fait suivant :

J’étais en train de jouer au salon sur un orgue Alexandre grand format. Je faisais un vacarme effroyable ; on devait m’entendre du bout de la rue. Un de mes bons amis entra : « Oh, qu’elle est bien empaillée ! » Je suivis son regard, et je vis qu’il regardait un mâle de tourterelle qui était en train de couver.

Sur le rayon du milieu d’une jolie petite étagère encombrée de bibelots, pendue par ses cordes juste à un pied au-dessus de mon orgue, ces charmants oiseaux avaient osé construire leur nid.

J’étais en train de jouir de son erreur quand la tourterelle changea subitement d’œil pour mieux contem-