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CONTES DU SOLEIL ET DE LA PLUIE

L’OISEAU BLEU

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Une lettre fixée autour d’une pierre tomba dans mon automobile…

Presque chaque jour, j’étais obligé de prendre le chemin étroit qui longeait les murs du vieux château, et de faire, au pied d’une petite tour détachée à la pointe extrême de ces murs, un virage lent et difficile. C’est par l’unique meurtrière de cette petite tour, je m’en rendis compte aussitôt, que la pierre avait dû m’être lancée.

Cent pas plus loin, ayant arrêté, je lus :

« Monsieur, je suis enfermée, malheureuse. Consentiriez-vous à risquer votre vie pour me sauver ? »

Je me renseignai au village voisin. Le château appartenait depuis l’hiver dernier au comte de Laubérun, qui vivait là avec sa femme, ses jeunes enfants et ses deux sœurs. Sauf le comte, qui sortait souvent en automobile, et que j’avais en effet rencontré maintes fois, tout ce monde ne franchissait que rarement enceinte du grand parc. Ils ne connaissaient personne. Je n’appris rien de plus sur eux.

Le lendemain, je passai près de la tour et levai la tête. Une lettre jaillit de la meurtrière. Je lus :

« Ainsi donc, je puis compter sur vous. Soyez béni. De la prudence. Je prépare tout ».

Deux jours durant, rien. Je fus déçu. J’avoue que l’aventure m’intriguait. Une femme à sauver, ma vie à risquer, du mystère, il n’en fallait pas davantage pour surexciter mon imagination de très jeune homme. Après tout, c’est moi, et non un autre, que l’on avait choisi.

Le cinquième jour, une lettre et un paquet me furent lancés. Dans la lettre, ces mots :