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“813”

— Donc, en fin de compte, la lutte est entre lui et moi. Et pour soutenir cette lutte, c’est-à-dire pour découvrir et réaliser l’affaire Kesselbach, je suis, moi, emprisonné, tandis qu’il est, lui, libre, inconnu, inaccessible, qu’il dispose des deux atouts que je croyais avoir, Pierre Leduc et le vieux Steinweg… — bref, qu’il touche au but, après m’en avoir éloigné définitivement. 

Nouvelle pause méditative, puis nouveau monologue :

— La situation n’est pas brillante. D’un côté tout, de l’autre rien. En face de moi un homme de ma force, plus fort, même, puisqu’il n’a pas les scrupules dont je m’embarrasse. Et pour l’attaquer, point d’armes. 

Il répéta plusieurs fois ces derniers mots d’une voix machinale, puis il se tut, et, prenant son front entre ses mains, il resta longtemps pensif.

— Entrez, monsieur le Directeur, dit-il en voyant la porte s’ouvrir.

— Vous m’attendiez donc ?

— Ne vous ai-je pas écrit, monsieur le Directeur, pour vous prier de venir ? Or, je n’ai pas douté une seconde que le gardien vous portât ma lettre. J’en ai si peu douté que j’ai inscrit sur l’enveloppe, vos initiales : S. B. et votre âge : 42.

Le Directeur s’appelait, en effet, Stanislas Borély, et il était âgé de quarante-deux ans. C’était un homme de figure agréable, doux de caractère, et qui traitait les détenus avec autant d’indulgence que possible. Il dit à Lupin :