Page:Leblanc - Contes Heroïques, parus dans Le Journal, 1915-1916.djvu/78

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— Mon nom, murmura l’homme, toujours à demi voix, ne vous apprendrait rien, mon colonel. C’est celui d’un assez mauvais bougre qui a eu pas mal de démêlés avec la justice de son pays… Un déserteur aussi, que la police recherche. Bref, en temps de guerre, cela ne pouvait durer bien des semaines. Un jour ou l’autre, on m’aurait mis la main au collet. Lorsque l’occasion s’est présentée, je l’ai saisie au vol.

— Quelle occasion ?

— Eh bien ! voilà… celle de me glisser dans la peau d’un autre. N’est-ce pas, le portefeuille du fils Dalbrecq, ses papiers, son livret militaire, sa feuille de route, tout cela c’était à ma disposition. Comment résister ? Alors, n’est-ce pas, j’ai pris ses vêtements, je lui ai mis les miens… avec tous mes papiers à moi… tout mon état civil… Et tout est réglé ainsi depuis bientôt un an, sans qu’on se doute de rien.

— Cependant, le père Dalbrecq… ? interrogea le colonel, qui s’intéressait à l’aventure.

— Le père Dalbrecq, oui, évidemment, c’était le point délicat. Comment faire pour qu’il ne s’aperçoive pas du changement ? Je recevais ses lettres, cinq lettres, dix lettres, où il se désespérait de