tâchait déjà de mettre en ordre. D’où il s’ensuit qu’elle acquit peu de choses au courant de sa jeunesse, car la raison d’un enfant ne peut se rendre compte que d’un nombre de choses restreint. Mais si son instruction en souffrit au point de rester longtemps insuffisante, son éducation morale y gagna et s’établit de bonne heure sur une base de menues réflexions personnelles et d’après la logique d’observations spontanées.
C’est là un point de départ excellent. Lorsque la lutte commença pour elle, bien que son état de femme ne lui permit pas de se libérer aussi facilement que moi des faits et des nécessités sociales, sa délivrance intérieure fut beaucoup plus rapide, parce qu’elle n’eut à s’affranchir de rien, aucune des idées que l’on essaya de graver en elle n’ayant mordu sur son âme secrète.
Trop scrupuleuse pour montrer quelque préférence, mère s’occupait de ma sœur autant que de moi. Mais comme je flattais son amour-propre par des mérites plus brillants ! Et puis la destinée d’une fille n’est pas douteuse : le mariage la guette. Un fils, lui, représente l’inconnu. Que fera-t-il ? Jusqu’où l’élèveront ses capacités ? C’est la porte ouverte aux espoirs les plus ambitieux.
En réalité ma vocation tardait à se dessiner. Rebelle aux sciences exactes, je me plaisais aux études littéraires. Mais c’étaient là de bizarres dispositions dont on aimait mieux ne point s’inquiéter. Autrement qu’eût signifié cette prédominance de