Page:Leblanc - L’Image de la femme nue, 1934.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
65
l’image de la femme nue

— Viens donc, Irène. Quel délice ! Des pieds à la tête le sable tiède me moule le corps, et les pointes de ma gorge se font de la place… petit à petit. Pourquoi ne viens-tu pas, Irène ?

Il lui suffisait d’un mouvement de tête pour voir Stéphane, qui se trouvait plutôt de côté. Quand elle l’eut vu, elle se mit à rire :

— Allons, bon ! un indiscret ! Il fallait tousser, monsieur, ou vous enfuir ! Jetez-moi mon peignoir.

Elle rit de plus belle.

— Ah ! j’oubliais… il n’est pas là… Irène doit me l’apporter…

« Allons, présentez-vous… Stéphane Bréhange, n’est-ce pas ? Ici à plat ventre, Élianthe.

— Stéphane Bréhange, en effet, approuva-t-il, ne sachant trop quoi dire. Vous m’excuserez. Je croyais qu’il n’y avait personne par ici… et que vous étiez en mer avec votre amie Irène.

— Non…, répliqua-t-elle en essayant, sans se retourner, de hausser son maillot. C’est ma sœur Lœtitia qui a été à Marseille.

Elle se débattit un moment contre son maillot qui était si entortillé sur lui-même qu’elle ne savait pas où le saisir. Alors elle y renonça et se levant, le buste nu, elle tendit la main d’un geste amical.

— Bonjour, Stéphane. Je suis contente de vous connaître. Que je vous regarde un moment… Très bien. De la franchise. Des yeux directs, comme je les aime. Maintenant, allez-vous-en, mon ami.

Il sourit.

— Pas encore.

— Pas encore ?

— Non. Moi aussi je demande le droit de vous regarder un moment.

Il recula de deux pas, et elle se présenta, comme elle l’eût fait pour permettre à quelqu’un d’examiner sa robe ou son chapeau, et il n’y eut pas plus de gêne ou de raideur dans son attitude que si elle se fût contemplée dans la glace de sa chambre.

Aucune coquetterie non plus, ni orgueil.

— Comme vous êtes belle ! murmura-t-il.

— Et impudique, ainsi que la Vénus que vous cherchez ? dit-elle gaiement.

— Vénus, oui. Impudique, non. L’impudeur de la statue provenait de son expression et de son désir. Vous êtes belle en toute pureté.

Pour la troisième fois, il retrouvait dans l’espace de ce domaine l’image merveilleuse. Comme Véronique, comme Lœtitia, Élianthe offrait la même magnificence antique, gonflée de cette même sève qui palpitait dans l’œuvre de son père.

Il s’inclina sur sa main qu’il effleura des lèvres et il allait