Page:Leblanc - La Cagliostro se venge, paru dans Le Journal, 1934.djvu/32

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

acharnée. Elle se défendait sauvagement. Il dut la saisir à deux bras, afin de la renverser sur un fauteuil et de la tenir immobile. Mais, quand il la sentit contre lui, toute palpitante, vaincue, mais secouée d’indignation et de haine, il eut un moment de vertige et fit un effort comme pour l’embrasser.

Tout de suite, il se redressa, furieux de ce geste stupide. Alors, elle éclata de rire dans un accès de rage qui la bouleversait.

— Ah ! vous aussi ! Vous comme les autres ! Une femme… On se débarrasse d’elle, en l’empoignant… comme une fille… Parbleu, un Lupin, ça se croit tout permis !… Toutes les femmes lui appartiennent… Ah ! cabotin, si vous m’aviez seulement effleuré la bouche, je vous tuais comme un chien.

Raoul était exaspéré.

— Assez de bêtises ! Vous n’êtes pas venue pour me dénoncer, ni me tuer, n’est-ce pas ? Parlez, crebleu ! Que voulez-vous ? Mais parlez donc !

Il lui reprit les deux bras et, la maintenant face à lui, il articula, d’une voix toute frémissante :

— Je ne suis pour rien dans cette affaire… Ce n’est pas moi qui ai frappé Simon Lorient… Je vous jure que ce n’est pas moi… Alors, parlez… Que voulez-vous ?

— Le salut de Simon, murmura-t-elle, dominée.

— D’accord. Dès qu’il ira mieux, je le ferai disparaître. Ne craignez rien. Il n’ira pas en prison.

Elle tressaillit.

— En prison, lui ! Mais il n’a rien fait pour aller en prison ! C’est un honnête homme, lui. Non, son salut, c’est par moi seule qu’il peut l’avoir. Moi seule peux le sauver, en le soignant.

— Alors ?

— Alors, je veux être reçue dans cette clinique et ne pas le quitter, le veiller jour et nuit. J’ai été infirmière durant quatre ans. Nulle autre que moi ne peut le soigner. Mais il faut que ce soit dès aujourd’hui… tout de suite.

Il haussa les épaules.

— Pourquoi ne pas m’avoir dit cela dès le début, au lieu de perdre votre temps à m’accuser sans motif ?…

— Donc, c’est convenu ? dit-elle âprement.

— Oui.

— Tout de suite, n’est-ce pas ?

Il réfléchit et promit :

— Oui, je verrai le directeur de la clinique. Il ne refusera pas. Je m’arrangerai même pour qu’il ne puisse pas refuser et je lui demanderai le secret. Seulement, il faut me laisser agir à ma guise. Quel est votre nom ?

— Faustine… Faustine Cortina.

— Vous en donnerez un autre à la clinique, et vous ne soufflerez pas un mot de vos relations avec Simon Lorient.

Elle se défiait encore.

— Et si vous nous trahissez ?

— Filez, dit-il, impatienté, en la poussant vers le petit jardin.

L’enclos communiquait avec le garage et le chauffeur n’était pas là. Raoul ouvrit la portière d’un cabriolet et ordonna :

— Enlevez votre foulard rouge, pour qu’on ne vous remarque pas. Et montez.

Elle monta.

Il sortit par une autre issue de la propriété et se dirigea vers la Seine, qu’il traversa au Pecq. Vivement, l’auto escalada la côte.

— Où allons-nous ? dit-elle. Si c’est un piège, tant pis pour vous !

Il ne répondit pas.

À Saint-Germain, il s’arrêta devant un grand magasin de confection et