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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/116

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LA MACHINE À COURAGE

l’infini… au-dessus des Aspirateurs et des Cirages. Cette affiche, lilliputienne de la rue, était géante en réalité. J’emportais dans les nuages l’annonce du concert, sa date et la fortune des Barella.

Allen essaya vainement de leur faire comprendre les lois de l’affichage, par catégories et par quartiers ― jamais les amateurs de concerts ne cherchent dans le ciel les annonces musicales. Mais le couple n’admettait pas qu’une pareille ascension dans l’éther, une aussi sainte place au milieu des astres, puisse être inefficace.

Le soir du concert, dans l’entrée de Town Hall, les deux Barelli se tenaient de chaque côté du contrôle. D’une voix tonnante, lui, décrétait qu’il allait imposer de nouvelles coutumes, qu’aucun critique n’entrerait sans payer, avec sa carte de presse, qu’il fallait en finir avec cet usage arbitraire. Elle, ponctuait le discours avec son parapluie.

Un des critiques s’étant faufilé dans la salle, Barelli sauta dessus, le prit au collet et le jeta à la porte. Quelques critiques payèrent leur place.

On ne me tint pas rancune, la presse fut même très bonne. Mais en fait de lancement, seul un scandale était lancé.

Plus tard nous apprîmes la généalogie Barelli ― cireurs de bottes de père en fils… Mon manager ne manquait pas à la tradition. Plié devant son trône de cirage, brosse en main, du matin au soir il cirait les chaussures à l’entrée du pont de Brooklyn.