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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/131

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PARIS

côtés des décors m’attendaient. Pourquoi ne pas planter une tente dans le bois de Boulogne ? Je me précipitai dans les ministères. Par miracle j’obtins quelques autorisations, mais les orages survinrent dans le ciel et un vent de pessimisme souffla dans les têtes.

Je fis la connaissance de Prampolini ― un esprit chasseur, des yeux qui découvrent, un caractère persévérant, un italianisme surchauffé. Tout de suite nous fûmes associés. Cherchant à deux, nous ne doutions pas de trouver une combinaison. Puisque la terre était hostile, je décidai de trouver un toit. Prampolini acquiesça et nous partîmes le nez en l’air. Ici un obstacle imprévu nous attendait. Nous trouvions des gens approbateurs mais il fallait consulter l’architecte, et quand il arpentait son toit, il le déclarait inapte à porter une foule.

Puisqu’il fallait redescendre, une cave s’imposait. Nous en trouvâmes une splendide dans l’île Saint-Louis ― des voûtes, des colonnes, quelque chose comme une salle du Mont Saint Michel — paix, sécurité, silence, tout était propice. Mais le cas n’avait pas été prévu dans les baux de location.

Je remontai à la surface. Alors ma hantise des buildings était un peu usée et le hasard nous fit visiter l’adorable maison de Balzac. Petite, mais prolongée de son jardin… Pourquoi ne pas y animer certains de ses contes ? Le comité demeura invisible. La dame gardienne ne voulut rien entendre.

Restaient l’eau et le ciel. Prampolini découvrit un vieux bateau, défroque de l’exposition des Arts Décoratifs. Son propriétaire voyageait. Trois mois plus tard, le refus nous parvint. La vieille coque était vendue pour un casino.

Pendant des mois nous allâmes encore dans les rues comme dans un musée de splendeurs prêtes à vivre. De la Sainte Chapelle aux étangs de St Cloud nous tremblions de « ce qu’on pourrait faire »… Le mystère de la Passion sur le parvis de Notre Dame ?… mais les autorités s’indignèrent. Alors le Musée de Cluny me retint secrètement. J’y passai des journées à établir des plans stratégiques comme j’en avais fait pour St.-Wandrille. J’en fis la confidence au gardien qui m’objecta timidement le trafic du boulevard St Germain. Je trou-