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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/212

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LA MACHINE À COURAGE

Je procéderai par élimination de systèmes, de croyances, de méthodes. J’exposerai quelques pages de mes notes et de mes impressions. Je le ferai sans aucun amour-propre et sans fausse honte. Je n’ignore pas le danger qu’il y a à parler des idées si ce n’est pour les nier. La négation est toujours saluée avec bienveillance et les spéculateurs qui n’offrent que des hypothèses semblent toujours respectables. L’hypothèse est une manière de ceinture de sauvetage pour l’esprit ; grâce à elle il flotte un peu plus loin avant de couler. Je n’ignore pas ce que ce mot recherche peut présenter de stupide, d’inutile, d’incomplet, d’erroné, de limité, d’excessif, de fébrile, d’hystérique, de prétentieux, de vain. La recherche semble vaniteuse, elle l’est cependant moins que de s’installer confortablement, les yeux fermés, dans une vie à laquelle on ne croit pas.

Au début il m’a semblé déchirant d’aborder à la vérité et de n’être plus jeune. Je suis tombée dans un désespoir profond. Mais voilà que le fait de travailler en moi dans une matière neuve et encore jamais éveillée, a ramené en mon être la jeunesse qui l’abandonnait. Un temps initial est devant mes yeux. Si aucun accident ne survient je saurai l’employer. Il m’apparaît comme le moule d’un gâteau de miel dont chaque alvéole attend d’être remplie.


1

Quelqu’un et Quelque chose.


Donc, en 1924, à New-York, je rencontrai quelqu’un et quelque chose.

On m’a demandé :

« — Est-il celui de Katherine Mansfield ? »

J’ai répondu Oui, pour l’apparence, Non, pour la réalité. Elle l’a vu « religieusement ». Je suis tentée de traduire « ordinairement ». Mal vu par elle, son mari, ses amis. Plus