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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/240

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LA MACHINE À COURAGE


II

Mais il y a l’amour

Au matin tous les oiseaux m’ennuyent —
ils font des arbres des salles de bal…
mais dans le jour qui s’en va
un seul cri léger, un chant qui se dit à peine
et se perd dans les ciels,
semble une mort douce et sourit dans les feuilles
qui s’éteignent.
Par ma fenêtre ouverte sur les vieux sapins noirs,
je suivais les mouvements lents de l’air
— premiers gestes d’une terre printanière ;
je regardais cette terre de fleurs et d’essais exemplaires,
j’imaginais que ses forces montaient et m’enlaçaient
comme une tendresse parente…
et je songeais, me croyant déjà rose, anémone ou jacinthe,
« Pourquoi ne pas mourir avec un sourire ? »


III

La vie des fenêtres.

Fenêtres qui m’ont vue,
partout où j’ai passé, j’ai gardé vos images —
cadres de paysages linéaires dans l’hiver,
touffus, confus, imaginaires dans l’excès des étés,
aquariums où vont et viennent mes songes,
pensées chercheuses, flèches coupant des rais de lumière,
fleurs, formes, fleuves, montagnes graves, glaciers blêmes…

Et voici l’arrivée des parfums — orangers, seringas, chèvre feuilles, jasmins —

ils entrent avec la nuit et se couchent, par couches,
dans l’air immobile de mon repos.