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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

« On n’en revient pas, racontait Adèle, un boute-en-train qu’on m’a dit, et aimable, et galant, un vrai jeune homme, quoi ! Il paraît qu’il est au mieux avec sa mère. Quant à ces demoiselles, elles en sont toquées. Dame ! c’est un beau gars… et pour peu qu’il se mette en frais, il leur tournera la tête… »

Gilberte pensa :

« Il a raison de se montrer aimable, c’est le se moyen de fléchir sa mère. »

Cependant il lui fallut un petit effort sur elle-même pour s’en tenir à cette pensée comme à la seule qui expliquât la conduite de Guillaume.

Deux jours encore se suivirent sans lettre. Un matin, Adèle arriva du marché.

« Ah ! bien, en voilà du nouveau ! je peux vous dire, maintenant que vous avez pris le dessus. M. Guillaume épouse l’aînée des Charmeron. »

Gilberte éclata de rire.

« C’est la chaisière qui fait le mariage.

— Non, non, je ne le tiens pas d’elle seulement, mais aussi de la bonne des Bottentuit et du jardinier de M. Beaufrelant. Mme de la Vaudraye l’a annoncé hier, en pleine soirée. »

Pas une seconde, Gilberte n’admit la possibilité d’une telle perfidie. Du fond d’elle-même, il ne pouvait monter rien d’impur, ni soupçons, ni doutes, ni mauvaises idées, et ce qui venait du dehors expirait autour de son amour comme des vagues impuissantes. Comment eût-elle imaginé la trahison puisqu’elle ne savait pas que l’on pût trahir ?

Toute la journée, elle fut donc très gaie. Pourtant,