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MA FEMME ET SON MARI

— Ah ! » fit-il abasourdi.

Il regarda ma femme, ou plutôt la sienne, puis me regarda. Je tournai la tête et m’éloignai.

À ce moment elle se plaignit.

« Qu’est-ce que tu as ? s’écria-t-il, Tu souffres ? »

Il y eut un silence ; puis, de nouveau, des plaintes. Alors il vint à moi et me dit :

« Docteur ; ayez l’obligeance de soigner Mme Chantelin ; je vous en serai très reconnaissant. »

Je m’approchai. Ma femme avait de petites contractions nerveuses. Je prononçai, hésitant :

« Il faudrait… il faudrait…

— Faites tout ce qu’il faut faire, docteur, je vous confie Mme Chantelin. »

Il insistait avec une intention visible sur ma qualité de docteur et sur le nom de Mme Chantelin, pour bien établir qu’en tout ceci il ne s’agissait que de soins médicaux donnés à une malade. Il m’implora :

« Je vous en prie, docteur, je vous en prie… »

Alors je me penchai sur la malade et l’auscultai.

Je fus tout de suite rassuré : je reconnaissais ce battement de cœur irrégulier, intermittent, que j’avais eu si souvent l’occasion de constater lorsque ma femme avait une émotion trop violente. Ce n’était rien. Il fallait simplement attendre. Nous attendîmes et, machinalement, suivant une habitude ancienne que j’avais prise en de semblables circonstances, je me mis à lui caresser le front et les cheveux.

D’ordinaire ces sortes de passes magnétiques très douces l’apaisaient et la réveillaient. Et, de fait, elle sembla se calmer, et puis elle ouvrit les yeux.