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Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/169

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— Assurément non, mais dans quelle intention ?

Elle soupira :

— Ah ! mon ami, c’est si facile de s’installer devant une table, de prendre une plume et d’écrire quelque vilenie. À Rouen, cela se pratique couramment.

Elle réussit à lui rendre courage, ayant de ces paroles fortes qui cicatrisent les plaies de l’âme.

— On doit dédaigner la médisance. L’écouter, même sans y croire, c’est dégrader l’épouse. Or, vous savez, Robert, que la vôtre est au-dessus du soupçon.

Mme Bouju-Gavart ne souffla mot de cette lettre à son mari, sentant de ce côté toute remontrance superflue.

Mais un matin elle se présenta chez Lucie. Elle la trouva couchée.

— Comme c’est obscur, dit-elle, j’aime bien la clarté, moi.

Elle fit glisser les rideaux. De la lumière jaillit. Alors, elle s’approcha et contempla sa rivale.

Les cheveux en désordre, l’épaule nue, la moue gracieuse d’une femme jeune qui s’éveille, Lucie s’étirait. Et tout au fond de l’épouse délaissée, un sentiment d’envie remua. Sur la table de nuit, un miroir se dressait dans un cadre