Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/44

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et elle s’endormit, l’âme légère, purifiée, comme si réellement l’absolution l’eût lavée de ses taches.

Toutefois le lendemain elle n’approcha pas de la sainte table. Robert n’en sut rien.

Ils sortaient toujours beaucoup. Ils étendirent ainsi le cercle de leurs relations et, désireux de rendre des politesses, ils remplacèrent les grands dîners par des thés « sans aucune cérémonie ».

Cette innovation d’un jeune ménage que la coutume dispensait de réceptions trop coûteuses, sembla fort originale. Lucie présidait avec grâce. On comparait ses allures simples et sa mise médiocre à ce qu’on appelait le mauvais genre et l’accoutrement tapageur de Mme Berchon. Pour celle-ci le monde était impitoyable, en haine de son élégance et de sa distinction naturelles. Lucie, elle, recueillait les sympathies générales. On approuvait sa tenue décente au milieu des hommes. Elle les regardait bien en face, mais d’un regard modeste, exempt de provocation. Elle riait discrètement et prenait de petites mines honteuses et comiques aux grivoiseries qu’on lui glissait. Le plus souvent, d’ailleurs, elle n’y entendait rien.

— Tu as l’air d’une ingénue, disait M. Bouju-Gavart.

Et persuadé au fond de ce qu’il avançait en