Page:Lebrun - Œuvres, tome 4, 1861.djvu/15

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De loin, dans tous les vents, son oreille inquiète
Croyait sans cesse ouïr le bruit de la trompette,
Comme un cerf qui frissonne au son lointain du cor :
Et vous, cerfs imprudents qu’elle lance à sa place,
Vous venez, dans sa trace,
Au pas de nos coursiers pour elle fuir encor.

Comme elle aura souri d’orgueil et d’artifice
A voir tomber sur vous, tranquille spectatrice,
Tous ces traits que déjà vers elle nous lancions !
Et quels mépris pour vous ! mépris bien légitimes,
Si, vendant les victimes,
Vous livrez à son or le sang des nations.

Abjurez ses traités : ses traités sont parjures.
Repoussez une main si féconde en blessures ;
L’intérêt est son dieu, l’ambition sa loi.
Comme la nation reine du monde antique
Craignait la foi punique,
Craignez, peuples, craignez la britannique foi.

C’est le mancenillier, l’arbre au fatal feuillage,
Qui recèle la mort sous son perfide ombrage.
Le voyageur s’y fie, il y porte ses pas :
Malheureux, que fais-tu ? fuis cet arbre infidèle ;
Sous son ombre mortelle
L’imprudent qui s’endort ne se réveille pas.