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cœur et qu’une âme, sous la conduite de Mgr de Laval. Ils ne faisaient qu’une seule famille dont il était le père. Biens de patrimoine, bénéfices simples, pensions, présents et honoraires ; ils mirent tout en commun. Mgr de Laval ne faisait rien de considérable que de concert avec tout son clergé ; ses biens aussi étaient en commun. Il n’y avait ni riches, ni pauvres. » On a là le secret de la merveilleuse fécondité de ce séminaire qui, semé en bonne terre comme le grain de sénevé, devint l’arbre magnifique dont la puissante ramure ombragea la moitié d’un continent.

Ce n’étaient pas seulement les prêtres du séminaire qui formaient la famille de Monseigneur : les curés de toutes les paroisses en étaient également. Le mandement de fondation du Séminaire portait cette clause : « Nous désirons que ce soit une continuelle école de vertu et un lieu de réserve, d’où nous puissions tirer des sujets pieux et capables pour les envoyer à toutes rencontres, et au besoin dans les paroisses, et tous autres lieux du pays, afin d’y faire les fonctions curiales… et les retirer des mêmes paroisses et fonctions, quand on le jugera à propos. » Ainsi les curés étaient tous amovibles ; ils appartenaient pour ainsi dire au Séminaire, lequel percevait les dîmes, les revenus, les gratifications royales, et se chargeait de l’entretien de tous les prêtres séculiers ; en cas de maladie et dans leur vieillesse, il les logeait, les soignait et les entretenait à ses frais. Il fallait sans doute l’aimable sainteté de l’évêque jointe à l’amour et à la vénération de ses fils, pour qu’un pareil système fonctionnât sans heurt, voire le plus harmonieusement du monde. Il dura jusqu’à la réforme faite par le deuxième évêque de Québec, qui ramena les choses à la discipline ordinaire de l’Église.

Entre temps les paroisses s’étaient multipliées sur les deux rives du Saint-Laurent, du Saguenay à Montréal, et sur la rivière Richelieu, du fort Sorel au lac Champlain. Le prélat se faisait un devoir de les visiter de temps en temps et d’y administrer le sacrement de Confirmation. Les Relations nous le montrent, l’été, en canot d’écorce, ramant lui-même à son tour ; l’hiver, en raquettes, sac au dos, n’ayant souvent pour toute nourriture qu’un pauvre