Page:Lecompte - Monseigneur François de Laval, 1923.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 10 —

Les négociations traînèrent en longueur, et ce n’est qu’en 1674 qu’une bulle de Clément X fonda le premier diocèse de la Nouvelle-France, en y préposant l’évêque de Pétrée, Mgr François de Laval.


Cependant, M. de Mésy, qui avait tant fait espérer de lui, qui avait débuté en parfaite union avec l’évêque et tout le monde, s’était tout d’un coup détourné de la bonne voie et avait jeté le trouble dans les diverses branches de l’administration : abus de pouvoir, opposition à l’évêque, tolérance renouvelée du trafic des boissons enivrantes, et naturellement mémoires sur mémoires envoyés à Colbert contre Mgr de Laval et les Jésuites. L’évêque, qui n’avait opposé d’abord que le silence et la résignation, dut présenter au roi les faits sous leur vrai jour. M. de Mésy fut rappelé. Mais, terrassé par la maladie, il mourut à Québec, après s’être réconcilié avec le prélat et avoir réparé de son mieux les scandales qu’il avait donnés.

M. de Courcelles, son successeur, fut remplacé en 1672 par le comte de Frontenac. Homme supérieur, où les défauts pourtant le disputaient aux qualités, grand seigneur, aimable, gai, généreux, mais indépendant, impérieux, violent : esprit vif mais ombrageux, il continuera l’œuvre de Talon et fera grandement avancer la colonie, mais il se bandera contre l’évêque et les missionnaires de la Compagnie de Jésus.

Le gouverneur voulut d’abord empiéter sur l’autorité religieuse en plusieurs points, surtout dans le règlement des dîmes et la substitution des cures fixes aux vicariats amovibles. La grosse question cependant fut derechef la vente de l’eau-de-vie. À l’exemple de ses prédécesseurs, il mit en avant, pour la permettre et peut-être en profiter, le spécieux prétexte de l’intérêt général et du développement du commerce et de l’industrie, sans oublier l’alimentation du trésor. Comme on pouvait s’y attendre, tous les désordres, signalés auparavant, se reproduisirent avec une intensité croissante. De l’Acadie aux grands lacs, ce fut chez les sauvages un déchaînement de toutes les passions.

Navré à la vue de ces ruines qui allaient s’accumulant,