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la princesse yaso'da


Elle avait le nez délicat, mais pointu comme la flèche du désir. — Ses dents étaient noircies par le betel. — Ses ongles étaient teints de henné rose. — Ses cheveux étaient noirs et longs. Qu’ils étaient noirs et longs les cheveux de la princesse Yaso’da ! — Ses petites lèvres bienveillantes avaient un sourire pareil aux premières clartés du ciel. — Ses pieds étaient nus comme son cœur, mais ils étaient blancs comme la neige du Jougando. — Son genou était une boule d’ivoire. — Son sein soupirait aussi doucement que la colombe dans les rameaux du Jougando. — Qu’il soupirait doucement le sein de la princesse Yaso’da !

Elle était la rose du Lasti-D’jumbo, la perle du monde.

Or, le jeune Tamaya, neveu du roi Satyavrata, aimait la fille du frère de son père, et elle l’aimait aussi ; mais il était rebelle à l’autorité du souverain du Lasti-D’jumbo ; car l’orgueil brûlait son cœur.

Le jeune guerrier était comme un tigre rayé du Zetchiavala. Nul n’égalait sa force et son agilité. C’est pourquoi il blâmait sans cesse son oncle pieux et pacifique, qui l’avait banni de sa présence. Tamaya était parti, mais la vierge royale avait gardé son cœur. Un soir, elle se promenait pensive avec ses compagnes. Le soleil rougissait l’écume des grandes eaux et baignait de pourpre la neige des montagnes. Il y avait une année que Tamaya s’était éloigné de Lasti-D’jambo. Au